A titre exceptionnel, la note du Service juridique sur le droit de retrait est mise à la disposition de tous. Pour retrouver les autres notes, rendez-vous dans la rubrique “Droits au but” de l’onglet juridique (rubrique réservée aux adhérents).
Qu’est-ce que le droit de retrait ?
N’importe quel salarié a le droit de se retirer d’une situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection (Article L.4131-1 et s. du code du travail).
La loi ne définit pas ce qu’il faut entendre par le terme « danger grave et imminent ». Un danger suppose une atteinte à l’intégrité physique ou morale, qui peut résulter de l’utilisation d’une machine, d’une ambiance de travail…
Qui peut exercer ce droit ?
Le droit de retrait peut être exercé individuellement par un salarié ou bien par un groupe de salariés.
Comment exercer son droit de retrait ?
Le salarié n’a pas à demander à l’employeur l’autorisation de quitter son poste. Le salarié est simplement tenu d’informer immédiatement l’employeur ou son représentant de la situation par tous moyens (y compris verbalement). A défaut de dénonciation préalable du risque à l’employeur, l’absence du salarié est considérée comme injustifiée (CA Douai, ch. soc., 27 oct. 2006, n° 05/03357).
Averti, l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour faire cesser le danger, et tant que ce danger n’a pas cessé, il ne peut obliger le salarié, qui a exercé son droit de retrait, à reprendre son travail.
Il s’agit d’un droit à se retirer du danger, mais pas d’un droit à quitter l’entreprise. En effet, le salarié qui fait jouer son droit de retrait doit rester à la disposition de son employeur. Celui-ci peut alors l’affecter temporairement sur un autre poste correspondant à ses compétences (le temps de prendre les mesures de prévention adaptées).
Parallèlement à l’information de l’employeur, le salarié peut prévenir le CSE, s’il en existe un dans l’entreprise, cette instance possédant un droit d’alerte.
Quelles sont les conséquences pour le salarié à la suite de l’utilisation de son droit de retrait ?
Un salarié qui s’est retiré d’une situation dont il avait un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ne peut encourir aucune sanction, ni retenue sur salaire (Article L. 4131-3 du code du travail).
Dans l’hypothèse où l’employeur considère, sous le contrôle éventuel du juge, que le salarié n’avait pas de motif raisonnable de cesser son travail, il peut le sanctionner (Cass. soc., 17 oct. 1989, n°86-43.272) et procéder à une retenue de salaire pour les heures non travaillées, et ce même si le salarié est resté à la disposition de l’entreprise (Cass. crim., 25 nov. 2008, n° 07-87.650 ; CA Montpellier).
A partir du moment où l’employeur a pris les mesures qui s’imposent par rapport au danger qui se présente dans son entreprise :
- Soit l’employeur considère qu’il n’existe pas ou plus de danger grave et imminent et il peut ordonner au salarié de retourner à son poste de travail. En cas de refus du salarié, il doit s’efforcer de le convaincre qu’il n’a plus de motif raisonnable de craindre pour sa vie ou sa santé. Si le salarié persiste à refuser de réintégrer son poste, il encourt alors une sanction disciplinaire (CA Versailles, 11e ch., 1er déc. 2009, n° 08/02708).
- Soit, au contraire, il considère, que la situation de travail présente encore des risques et il ne peut pas demander au salarié de reprendre son activité dans une telle situation (Article L.4131-1 du code du travail).
Quelles sont les limites au droit de retrait ?
La faculté ouverte au salarié de se retirer d’une situation de travail qu’il estime dangereuse doit être exercée de telle manière qu’elle ne crée pas pour autrui une nouvelle situation de risque grave et imminent (Article L. 4132-1 du code du travail).
Ainsi, si le salarié ne prend pas en compte les éventuels risques encourus par ses collèges du fait de son retrait, il commet une faute grave, que l’employeur peut sanctionner (Cass. soc., 21 janv. 2009, n° 07-41.935).
Le cas particulier de la pandémie de Coronavirus :
Une situation de pandémie sanitaire ne justifie pas, en elle-même, le recours au droit de retrait. En effet, dans ce cas-là, le risque ne peut pas être juridiquement qualifié de risque professionnel dans la mesure où la contamination potentielle n’est pas directement liée à l’activité de l’entreprise.
Cependant, le droit de retrait en cas d’épidémie peut être envisagé à minima dans deux situations (Articles L. 4131-1 et suivants du code du travail) :
- L’employeur demande au salarié de se déplacer vers une zone à risque (ces zones sont régulièrement mises à jour sur le site https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus).
- Un collègue du salarié revient d’une zone à risque ou a été en contact avec une personne contaminée.
Il faut néanmoins noter, que l’employeur ne pourrait contraindre un salarié à rester chez lui en cas de simple doute sur son état de santé, à moins de lui octroyer un congé exceptionnel rémunéré.
A l’inverse, le droit de retrait ne sera pas justifié dès lors que l’entreprise a mis en œuvre l’ensemble des mesures prévues par le code du travail et par les recommandations nationales (disponibles et actualisées sur le site https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus) pour assurer la protection de la santé des travailleurs face aux risques engendrés par une telle situation (circulaire ministérielle DGT 2009/16 du 3 juillet 2009 ; Article L.4121-1 du code du travail).