Les représentants du personnel disposent d’une liberté de déplacement (d’accès à tous les locaux dans lesquels du personnel est employé et qui relèvent de leur mandat) afin d’exercer leurs différentes missions, notamment pour rencontrer le personnel et s’enquérir des conditions de travail (art. L. 2315-14 c. du trav.).
Cette liberté de déplacement est « d’ordre public », c’est-à-dire qu’elle ne peut pas être entravée ou restreinte par l’employeur, sous peine de sanctions pénales pour délit d’entrave (Cass. soc., 26 févr. 1992, n°88-45.284). Elle s’exerce aussi bien durant les heures de délégation, qu’en dehors des heures habituelles de travail (C. trav., art. L. 2315-14 et L. 2143-20).
NB : cette liberté ne s’applique que dans les locaux où sont employés du personnel et qui relèvent du mandat du salarié qui se prévaut de sa liberté de déplacement (ainsi si un établissement est fermé il ne sera pas possible d’y accéder puisqu’il n’y aura pas de personnel présent).
Même en cas de suspension du contrat de travail (activité partielle, congés, arrêt maladie) la liberté de circulation du salarié continue à s’appliquer car son mandat n’est pas suspendu (Cass. crim., 25 mai 1983 nº 82-91.538 ; Cass. 2e civ., 9 décembre 2010, nº 09-17.449).
La seule limite posée par la loi consiste dans le fait que le représentant du personnel ne doit pas apporter de gêne importante à l’accomplissement du travail des salariés (art. L. 2315-14 c. trav.).
La jurisprudence a également considéré que l’employeur peut, pour des raisons de sécurité ou de confidentialité, réglementer l’accès à certaines zones (à condition que les mesures prises soient proportionnées au but recherché : Cass. soc. 9 octobre 2019, n° 18-13914).
Par conséquent, les représentants en circulation dans l’entreprise se doivent donc de respecter les règles d’hygiène et de sécurité en vigueur dans l’entreprise et ne pas mettre en danger la santé des autres salariés (art. L. 4122-1 c. trav.).
Les déplacements et rencontres au sein des entreprises doivent donc se faire dans le respect des gestes barrières et autres mesures prévues par le protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés en entreprise face à l’épidémie de Covid-19 (https://travail- emploi.gouv.fr/IMG/pdf/protocole-national-sante-securite-en-entreprise.pdf).
Qu’en est-il des déplacements inter-régionaux ?
L’art. 4 du Décret n°2020-1310 du 29 octobre 2020 prévoit que « Tout déplacement de personne hors de son lieu de résidence est interdit à l’exception des déplacements professionnels ne pouvant être différés.
Les personnes souhaitant bénéficier de cette exception doivent se munir, lors de leurs déplacements hors de leur domicile, d’un document leur permettant de justifier que le déplacement considéré entre dans le champ de l’une de cette exception ».
Les déplacements entre régions sont donc interdits à l’exception des déplacements pour motif professionnel (de la même façon qu’au premier confinement).
Attention, il convient toutefois de limiter au maximum les déplacements des représentants du personnel qui ne seraient pas nécessaire, surtout en ce qui concerne les grands déplacements (entre les régions). En effet, s’il existe par exemple des représentants de proximité sur place, ou des délégués syndicaux (appartenant à la même organisation syndicale) alors le déplacement ne paraît plus absolument nécessaire et le tribunal judiciaire a jugé que dans ce cas-là, l’entrave à la liberté syndicale n’était pas caractérisée.
Le tribunal judiciaire de Saint Nazaire a rendu un jugement en précisant certaines règles quant à la liberté de déplacement des représentants du personnel en période de crise sanitaire (Tribunal judiciaire de Saint Nazaire, 27 avril, RG 20/00125).
Il considère que constitue un trouble manifestement illicite, le fait pour un employeur de restreindre l’accès et la circulation d’un délégué syndical sur le site de l’entreprise (au motif des mesures d’urgence liées à la crise sanitaire) en lui refusant la délivrance d’une attestation d’autorisation de déplacement.
Le Tribunal relève d’abord que la loi d’urgence du 23 mars 2020 n’a pas interdit la poursuite de certaines activités et donc de la présence de salariés sur sites. En conséquence, l’absence de possibilité de communication avec les salariés présents sur le site (la communication syndicale par mail étant interdite), « est disproportionnée au but recherché et légitime de protection sanitaire de l’ensemble des salariés et constitue un trouble manifestement illicite ».
Il note ensuite que l’ordonnance du 1er avril 2020 portant mesures d’urgence relatives aux instances représentatives du personnel ne contient pas de limitation à la liberté de circulation des représentants du personnel, « laquelle s’inscrit dans le cadre juridique d’articulation des libertés syndicales avec les limitations strictement nécessaires et proportionnées y étant apportées dans le cadre de l’urgence sanitaire ».
En effet, le ministère du travail a d’ailleurs rappelé que : « les élus du CSE, particulièrement ceux membres de la CSSCT, et les délégués syndicaux, doivent pouvoir continuer à exercer leurs missions à l’intérieur des entreprises dont l’activité n’est pas interrompue. Elles requièrent le maintien de leur liberté de circulation, reconnue d’ordre public » (Questions-réponses sur le dialogue social durant l’épidémie de covid-19).
Toutefois, dans cette affaire, le juge a considéré que l’interdiction d’accès au site des élus du CSE non- membres de la CSST ne constitue pas une entrave à la liberté de déplacement des représentants du personnel car :
Par conséquent, la FGTA-FO et ses représentants ne peuvent être entravés dans leur liberté d’action syndicale, seules la loi et les décisions préfectorales, s’imposent à nous et peuvent définir les limites de notre activité syndicale.