Retrouvez l’article de Mickaël Ciccotelli, paru sur Tripalio.fr
Désormais confinés dans le cadre de la lutte contre la propagation du coronavirus, beaucoup de Français s’interrogent quelque peu quant à la continuité de leur approvisionnement en denrées alimentaires. Cette continuité dépend notamment de la mobilisation des salariés de la grande distribution.
Priés par l’exécutif de tenir leur poste de travail malgré les risques liés à la diffusion du coronavirus, ces personnels ne peuvent en revanche pas compter, en retour, sur l’appui du gouvernement pour l’amélioration de leurs conditions salariales.
Appel à la mobilisation générale contre le coronavirus
Les principaux représentants du gouvernement le répètent aussi souvent qu’ils le peuvent : la grande distribution faisant partie des secteurs économiques “essentiels” au maintien de la maison France en période de lutte contre le coronavirus, ses salariés ne doivent pas manquer à l’appel. Il en va de la possibilité, pour chacun, de continuer à se nourrir. En milieu de semaine, sur LCI, Bruno le Maire, le ministre de l’Economie et des Finances a ainsi appelé “tous les salariés des secteurs essentiels à se rendre au travail”, leur promettant le respect des “conditions de sécurité sanitaire maximales”.
Hier, toujours sur LCI, Muriel Pénicaud, a relancé cet appel à la mobilisation générale. “On a besoin de tout le monde sur le pont” a-t-elle en effet déclaré, estimant que, face au coronavirus, les salariés de la grande distribution faisaient partie de ceux qui avaient un “devoir de solidarité” vis-à-vis de la nation. “En guerre, il y a les soignants qui sont devant. Ce sont nos soldats de la Santé. Mais, derrière, il faut aussi que, dans des conditions de protection des salariés, l’activité continue. Sinon, tout va s’arrêter et les Français n’auraient plus de quoi manger, avoir l’électricité ou internet. Chaque métier est important. L’opérateur de télécom a une responsabilité, le supermarché aussi. Tout le monde peut aider” a poursuivi Mme Pénicaud.
Un secteur prêt à des sacrifices…
A vrai dire, dans la grande distribution, personne n’a attendu ces différents appels gouvernementaux pour demeurer mobilisé malgré la propagation du coronavirus. Dès le 11 mars, le patronat de la branche, ainsi que celui de l’agriculture et celui de l’agroalimentaire, ont ainsi assuré qu’ils mettraient tout en œuvre afin d’assurer l’approvisionnement alimentaire de la France. “Nous, acteurs responsables et unis de l’alimentation des Français, agriculteurs, éleveurs, coopératives, entreprises alimentaires et distributeurs, nous mobilisons pour continuer à fournir aux Français les produits alimentaires nécessaires, dans le contexte de crise du coronavirus qui impacte aussi notre secteur” ont-ils promis.
De leur côté, les organisations salariales ont, elles aussi, pris leurs responsabilité afin d’assurer l’engagement des salariés pour l’approvisionnement alimentaire de la population. En début de semaine, la FGTA-FO, première organisation en voix dans la branche, a notamment indiqué que “la société peut compter sur les salariés du secteur de la Grande distribution en magasin et en logistique”. Deuxième organisation dans le secteur, la CFDT des services a pour sa part affirmé que l’heure n’est pas au fait de “semer la panique ou [de] contribuer à la désorganisation du pays”. En somme : les représentants des salariés de la grande distribution feront en sorte que leurs troupes tiennent leurs positions en ces temps de crise sanitaire du coronavirus.
… malgré la mesquinerie gouvernementale
Ce volontarisme affiché par les représentants du secteur n’est pas seulement louable : il est en réalité remarquable. En effet, ces derniers mois, l’exécutif ne s’est pas vraiment distingué, c’est le moins que l’on puisse dire, par sa grande sollicitude à l’égard des travailleurs de la branche. Au contraire, le gouvernement fait preuve d’une grande mesquinerie à leur encontre.
Comme nous l’avons expliqué au début de l’année, le gouvernement a mis un temps considérable à étendre l’accord salarial de 2018 et a refusé d’étendre la disposition visant à inclure la prime annuelle dans les minima de branche. Il a jugé que cette disposition était contraire aux ordonnances Travail. Dénonçant unanimement cette décision, les partenaires sociaux ont attaqué l’arrêté d’extension devant le Conseil d’Etat. Dans l’accord salarial qu’ils ont signé en juin 2019, ils ont en outre décidé de procéder de la même manière qu’en 2018 mais en indiquant cette fois-ci directement dans la grille des salaires le “salaire mensuel minimum garanti” à appliquer. Ils attendent toujours l’extension de leur accord…
Du côté de la FGTA-FO, on ne décolère pas contre l’attitude gouvernementale. “La nouvelle doctrine de la direction générale du travail est inacceptable” tonne en effet l’organisation, qui poursuit : “On parle de salariés pour qui chaque euro compte. La branche veut faire en sorte d’encadrer la concurrence sur les rémunérations mais le gouvernement refuse !” La FGTA-FO assure qu’elle va demander l’extension immédiate de l’accord de juin 2019, “avec effet rétroactif”. “Face à la crise actuelle, nous voulons bien faire notre part du travail mais le gouvernement doit assumer la sienne” tonne la fédération syndicale. Force est de reconnaître qu’en ces temps de mobilisation contre le coronavirus, la politique gouvernementale au sujet des salaires de la grande distribution est injustifiable.