Le développement du télétravail s’est accéléré au cours des vingt dernières années, concomitamment au développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Dans leur accord-cadre du 22 juin 2020, les partenaires sociaux européens soulignent d’ailleurs l’impact de la numérisation de l’économie sur l’organisation du travail, et notamment sur le télétravail. Il est rappelé que cet accord européen a vocation à faire l’objet d’une transposition dans chacun des Etat membres dans les trois ans suivant sa signature. Les acteurs sociaux au niveau national interprofessionnel s’inscrivent dans cette perspective. Ils soulignent que le présent accord permet de transposer les points 2, 3 et 4 du thème 2 de l’accord-cadre précité.
L’année 2020 a été jusqu’ici marquée par une crise sanitaire sans précédent, dont les impacts économiques et sociaux commencent à peine à être mesurés. Dans un objectif de continuité de l’activité économique partout où cela était possible, et de protection des salariés, le télétravail a été largement utilisé depuis mars 2020, dans les circonstances exceptionnelles dictées par la pandémie de la Covid-19 : s’il s’est agi d’un télétravail « exceptionnel », dont les conditions de mise en oeuvre n’étaient pas comparables au télétravail « habituel » dans le cadre de l’activité normale de l’entreprise, il a généré une large diffusion de cette forme d’organisation du travail, soulevant un certain nombre de questions opérationnelles. Ainsi de nombreux salariés souhaitent télétravailler plus régulièrement qu’auparavant et de nombreuses entreprises envisagent une mise en place élargie de cette organisation du travail.
Les bénéfices attendus de son développement peuvent satisfaire autant les entreprises que les salariés, tout en tenant compte des problématiques inhérentes à sa mise en place. Le télétravail peut, dans certains cas, être considéré comme une solution permettant de prendre en compte certaines situations spécifiques de salariés.
Il est également important de considérer les impacts territoriaux et environnementaux du développement du télétravail sur l’écosystème de l’entreprise :
– s’agissant des impacts territoriaux : si les territoires peuvent bénéficier d’un avantage compétitif en offrant des conditions d’accueil optimales au sein, par exemple, de tiers-lieux (accessibilité tarifaire, qualité de l’animation et des infrastructures de l’espace de co-working, mixité des espaces offrant des relations avec des pépinières d’entreprises, etc.), le développement du télétravail peut générer des impacts négatifs sur l’environnement direct des entreprises à même de le développer. Il convient, dans la mesure du possible, d’anticiper l’ensemble de ces impacts et de réfléchir aux leviers de développement que sont notamment l’accès aux infrastructures publiques, de transports, commerciales et de logement de qualité. En tout état de cause, cette évolution devrait pousser l’État et les collectivités locales à anticiper ces impacts et à accélérer la stabilité et la qualité des infrastructures, en concertation avec les acteurs sociaux dans les territoires ;
– s’agissant des impacts environnementaux : le télétravail a un impact positif sur l’environnement car il permet de réduire les déplacements. A contrario, l’utilisation accrue des outils numériques peut augmenter la consommation énergétique. Aussi, en mettant en regard les enjeux de la transition écologique et de la transformation numérique, un développement accru du télétravail peut être envisagé, susceptible de permettre aux employeurs et aux salariés de participer à ces transitions.
Face à cette situation, et dans la continuité des conclusions unanimes de la concertation paritaire de 2017 sur le développement du télétravail, les partenaires sociaux ont mené, de juin à septembre 2020, un travail de diagnostic approfondi pour :
– répertorier les enseignements à tirer de la première période de confinement qui a donné lieu à un recours très important à une forme de télétravail,
– identifier les enjeux et questions qui se posent dans la perspective d’un développement potentiellement plus important du télétravail dans le cadre de l’activité « normale » de l’entreprise, ou en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure.
Les conclusions de ce diagnostic ont reçu un avis favorable de la CFDT, CFE-CGC, FO d’une part, et du MEDEF, CPME et U2P d’autre part.
Le cadre juridique de la mise en oeuvre du télétravail est constitué de l’accord national interprofessionnel de 2005 relatif au télétravail et des articles L1222-9 et suivants du code du travail, modifiés par l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, dont la portée a pu être précisée par la jurisprudence.
Le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux, de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication. Dans la pratique, il peut s’exercer au lieu d’habitation du salarié ou dans un tiers-lieu, comme par exemple un espace de co-working, différent des locaux de l’entreprise, de façon régulière, occasionnelle, ou en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure. En tout état de cause, la mise en oeuvre du télétravail doit être compatible avec les objectifs de performance économique et sociale de l’entreprise.
C’est au niveau de l’entreprise que les modalités précises de mise en oeuvre du télétravail sont définies, dans le cadre fixé par le code du travail, les dispositions de l’ANI de 2005 et du présent accord, et par les dispositions éventuelles négociées au niveau de la branche. Les organisations d’employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel signataires tiennent à cet égard à souligner la vivacité du dialogue social au sujet du télétravail : depuis le début de 2020, et à la date de la signature du présent accord, on relève plus de 700 accords d’entreprise signés sur cette thématique, qu’ils soient nouveaux ou constituent des avenants à des accords préexistants.
Constatant que l’articulation entre ces sources juridiques n’est pas toujours aisément comprise par les employeurs et les salariés, les organisations signataires souhaitent, par le présent accord, expliciter l’environnement juridique applicable au télétravail et proposer aux acteurs sociaux dans l’entreprise, et dans les branches professionnelles, un outil d’aide au dialogue social, et un appui à la négociation, leur permettant de favoriser une mise en oeuvre réussie du télétravail.
Forts de ces constats et de ces objectifs, les organisations de salariés et d’employeurs représentatifs au niveau national et interprofessionnel conviennent des dispositions suivantes :