Dans le questions réponses du gouvernement sur le télétravail (mis à jour le 22 octobre), il est précisé que « compte tenu de la situation actuelle avec une circulation du virus qui continue, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés (article L. 1222-11 c. trav.)».
Le protocole national (mis à jour le 29 octobre) rappelle que « le télétravail est un mode d’organisation de l’entreprise qui participe activement à la démarche de prévention du risque d’infection au SARS-CoV-2 et permet de limiter les interactions sociales aux abords des lieux de travail et sur les trajets domicile travail. Dans les circonstances exceptionnelles actuelles, liées à la menace de l’épidémie, il doit être la règle pour l’ensemble des activités qui le permettent. Dans ce cadre, le temps de travail effectué en télétravail est porté à 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l’ensemble de leurs tâches à distance. »
Cependant, le protocole national du gouvernement n’a pas de valeur juridique et ne peut donner lieu à sanction s’il n’est pas respecté. C’est ce qu’a rappelé le Conseil d’État dans le cadre de l’ordonnance de référé-urgence rendue le 19 octobre 2020 (n° 444809).
Il ajoute toutefois que s’il n’a pas possible de sanctionner l’employeur pour non-respect du protocole, celui-ci peut être sanctionné sur d’autres fondements.
Les inspecteurs du travail, comme fondement d’un procès-verbal, peuvent s’appuyer sur les articles L. 4121-1 (L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs) et L. 4121-2 c. trav (L’employeur met en œuvre les mesures prévues à l’article L. 4121-1 cela nécessite de prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle et un aménagement des postes de travail).
Le Premier ministre a d’ailleurs annoncé (le 29 octobre 2020) que « des contrôles et des sanctions » seront mis en œuvre si la généralisation du télétravail n’est pas respectée, partout où elle est possible.
Le Conseil d’État précise également que l’appréciation du respect de l’obligation de sécurité par l’employeur s’effectue nécessairement en tenant compte du respect ou non du protocole sanitaire en vigueur au moment des faits. Il s’expose donc en cas de contamination d’un salarié au travail, à se voir condamner pour faute inexcusable. A l’inverse, s’il les respecte, on peut penser au vu de l’appréciation portée par le Conseil d’État que si un salarié est contaminé au travail, l’employeur sera regardé comme ayant rempli son obligation de sécurité et sera donc à l’abri de poursuites et d’une condamnation pour faute inexcusable.
L’article L. 1222-11 c. trav ajoute qu’: « En cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés. »
L’article L. 1222-9 c. trav. prévoit que s’il existe un accord collectif ou une charte mettant en place le télétravail dans l’entreprise, l’employeur « qui refuse d’accorder le bénéfice du télétravail à un salarié qui occupe un poste éligible à un mode d’organisation en télétravail dans les conditions prévues par accord collectif ou, à défaut, par la charte, motive sa réponse ».
En l’état actuel du droit, il est donc possible de sanctionner un employeur qui refuserait d’appliquer le protocole sanitaire et donc de permettre aux salariés éligibles de bénéficier du télétravail. Il est cependant impossible pour l’État de contraindre toutes les entreprises à recourir systématiquement au télétravail. Il faudrait pour ce faire une nouvelle disposition législative impérative.
À défaut d’obligation explicite, on peut donc parler d’un recours « quasi-obligatoire » au télétravail, ou d’une généralisation, là où il peut techniquement être mis en place.
Outre le maintien des gestes barrières (règles de distanciation sociale, port du masque, jauge, règles d’hygiènes…) pour les activités ne pouvant être réalisées en télétravail, il devra être prévu :
- L’organisation systématique d’un lissage des horaires de départ et d’arrivée du salarié afin de limiter l’affluence aux heures de pointe,
- La réduction des déplacements domicile-travail et aménagement du temps de présence en entreprise pour réduire les interactions sociales,
- L’obligation de définir un plan de gestion des flux intégrant les salariés et les clients, fournisseurs et prestataires avec la mise en place de plans de circulation incitatifs visant à fluidifier plutôt qu’à ralentir.
La FGTA-FO rappelle qu’avec la mise en œuvre du télétravail doivent également être prises en compte les organisations de travail et la santé au travail des salariés.
Les CSSCT doivent être pleinement associées au processus de mise en place du télétravail dans les entreprises.